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Avec la pause estivale, veiller à l’écart pour se ressourcer.
Adhérer aux « états de Jésus », invoquer l’Esprit qui veille au sein de l’écart dont Isaïe se fait l’écho : « Nous étions tous desséchés comme des feuilles, et nos crimes, comme le vent nous emportaient. (...) Pourtant, Seigneur tu es notre Père » qui « vient à la rencontre de celui qui pratique la justice ». « Nous étions… Pourtant… » (Is. 64, 5). La construction de la phrase l’exprime : l’écart est irréductible. Nous sommes fatigués par l’année qui s’achève avec son lot de joies et d’épreuves. Pourtant, dans l’Esprit-Saint, Christ veille en tout être humain… L’écart entre l’homme endormi et le Dieu veilleur ouvre l’accès à la réserve d’espérance toujours disponible dans la promesse de Dieu. Veilleur, réveille ta vaillance !
Adhérer à l’état de Jésus qui veille en l’homme, pour veiller avec lui sur les autres, à la manière des chrétiens qui répondent à l’appel de l’ACAT. Le 26 juin de chaque année ils veillent pendant « la nuit des veilleurs » en communion avec les victimes de la torture toujours pratiquée dans un pays sur deux. Ils veillent en communion avec ces hommes, ces femmes harcelés qui éprouvent dans leur chair la volonté d’être niés dans leur humanité. Isolés, ils sont menacés… Informés que d’autres veillent, agissent et espèrent avec eux, ils maintiennent, allumée, la petite flamme de l’espérance, aussi fragile soit-elle.
Dans le texte d’Isaïe, l’écart entre la promesse et les événements n’est pas destiné à être comblé : « L’Esprit creuse en toi la pauvreté pour t’apprendre à prier ». L’écart irréductible entre Christ veilleur et l’homme endormi qui se dessèche, est à la mesure de la réserve d’espérance : Dans le désert de l’exode, dans l’expérience de l’exil, celle de l’invasion étrangère et jusqu’en Jésus de Nazareth abandonné de Dieu, l’expérience juive atteste que veiller jusqu’au moment où cette parole semble sombrer dans les méandres des événements, veiller au moment où l’on éprouve ces « grands moments de solitude », rend disponible à l’action de l’Esprit qui ouvre les yeux sur l’ampleur et la profondeur de la promesse. Le voile de l’aveuglement se déchire… Dans la foi en la Résurrection, le veilleur confesse : « Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Christ… » (Rm 8, 39). Veilleur, n’éteins pas la flamme, mais réveille ta vaillance !
Adhérer à l’état de Jésus qui veille au sein de l’humanité. Envisageons ici l’écart comme un espace grâce auquel l’homme s’ouvre aux autres. Au lieu de gémir sur lui et sa pauvreté (Ps 41-42), le veilleur, animé par l’Esprit, se rend disponible pour participer à la veille du Christ donné pour les autres. Devant les appels du monde éducatif, il n’est pas d’habitudes, de lassitude ou de solitude qui tiennent … À la lumière du mystère pascal, la veille suscite initiative et entreprise. À condition de veiller comme si tout dépendait de soi et d’agir comme si tout dépendait de Dieu, elle favorise la rencontre entre Celui qui vient « faire toute chose nouvelle » (Ap 21, 7) et « celui qui pratique la justice et qui se souvient [du Seigneur] en suivant [s]on chemin » (Is 64, 4). En Christ, c’est le même. Là où l’homme endormi suit ses chemins de violence et d’injustice, participer à la veille de Jésus favorise l’irruption de la Vie nouvelle qui accomplit les promesses de l’unique Alliance, promesses de vie, de paix, de justice, de réconciliation.
En cette pause estivale, Veilleur, réveille ta vaillance !
François Picart, prêtre de l’Oratoire
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