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Savoir se retirer
Aux bonnes résolutions fréquemment partagées en début de chaque année et, soi-dit en passant, rapidement abandonnées faute d’avoir répondu à la question qui fournira une bonne raison de s'engager, je préfère ces interpellations qui ne cessent de surprendre, au point, parfois, de nous ébranler et qui interrogent, en définitive, notre rapport au monde.
Le propos du pape François prononcé le 4 décembre dernier, lors de son voyage à Chypre et en Grèce, au cours d’une soirée consacrée à rencontrer la communauté jésuite locale, est à n’en point douter, de cet acabit. Je le cite :
« Lorsque l’on entame un processus, il faut le laisser se développer, …, puis se retirer ». Il évoquait, par ces mots, le mode d’action des jésuites… et la nécessité de se retirer, le temps venu, des responsabilités, étant entendu que chaque œuvre « appartient au Seigneur » et non à celui qui l’a fondée ou entretenue.
Mieux, beaucoup mieux que toute résolution, cette invitation à la désappropriation résonne comme une exhortation, un stimulant des plus efficaces, presque un impératif. Dans le fonds, cet appel à la dépossession questionne la vacuité de ce que nous nous efforçons d’accumuler pour nous sécuriser ; elle réduit le sentiment de vanité lié à la grandeur de notre contribution à sa plus simple expression, à l’image de la pierre ajoutée à l’édifice d’une construction entamée bien avant nous et qui se poursuivra longtemps après. Surtout, elle anéantit toute prétention à ériger la mission en réalisation auto référente.
Le propos du Pape François invite en définitive, à interroger notre relation au monde via notre propre engagement, et donc notre rapport intime à la mission. Celle-ci ne se résume pas à la seule charge confiée à quelqu’un d’accomplir quelque chose, mais figure bien davantage cette invitation adressée à Abraham à quitter sa terre et tout ce qui lui est familier pour joindre l’inconnu, suivant l’appel d’un Dieu encore inconnu, car comme l’affirme la théologienne Adwig Ana Maria Muller, « ce qui fait la mission et donc, le missionnaire, ce n’est pas en premier lieu le message ou l’enseignement qu’il apporte aux autres. C’est plutôt le courage de partir de chez lui et d’aller vers l’inconnu. »
Pour le moins exigeant, voire provocant. Mais la provocation est la hauteur du Ministère que le Christ a vécu, de l’Espérance qu’il nous a partagée, d’une foi qu’il s’agit de vivre en choisissant « la pauvreté avec le Christ pauvre plutôt que la richesse, les humiliations plutôt que les honneurs »1.
Voilà une bonne résolution pour 2022 ! La question qui conditionne la capacité à s’engager reste d’accepter de ne plus s’appartenir, d’accepter de mourir à soi-même pour mieux marcher avec Lui et en Lui. Une façon de se retirer en somme.
Bonne année à chacun !
Jean-Jacques Erceau - Secrétaire général
1 Les exercices spirituels - Saint Ignace de Loyola
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Une journée destinée à toutes les personnes engagées dans l'exercice de la tutelle au sein des réseaux, qui souhaitent relire l'expérience spirituelle fondatrice à partir de médiations précises pour mieux s'en ressaisir et les approfondir :
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